Visite du château de Coppet au bord du lac Léman
Résidence du ministre Jacques Necker et de Madame de Stael
la construction du château remonterait à l'époque de Pierre de Savoie, mort en 1268. Elle se serait achevée sous l'un de ses successeurs, les Villars. Dès 1300, le terme de "castellum" ou bourg fortifié apparaît dans les documents de l'époque. Le château avec son donjon dominait les maisons groupées près du lac. Après les Villars, Humbert d'Allamand, puis Othon de Grandson le poète chevalier, habitèrent Coppet.
Au cours des luttes qui opposèrent les Vaudois aux Bernois, ceux-ci s'emparèrent du château et l'incendièrent en partie. Après sa reconstruction, il fut propriété des seigneurs de Viry, du connétable de Lesdiguières, puis de la puissante famille des princes de Dohna, gouverneurs de la ville d'Orange en France. Ce sont eux, puis leur successeurs, les Hogguer, qui ont donné au château son aspect actuel, entre les années 1680 et 1730 environ.
La renommée du château de Coppet commence en 1784, année de son achat par Jacques Necker, d'origine genevoise, mais ayant fait une magnifique carrière à Paris, où il finit par être choisi par le roi de France Louis XVI pour être son ministre des finances.
Depuis cette époque la maison est restée entre les mains de ses descendants, au premier rang desquels figure sa célèbre fille, Madame de Staël. Après son fils aîné, Auguste, mort jeune, et sa veuve, le château est passé en 1878 entre les mains de la famille d'Haussonville, et l'actuel propriétaire représente la huitième génération depuis Necker et le dixième propriétaire depuis 1784.
Coppet est la seule demeure de la région lémanique encore en mains privées, ayant conservé tous ses meubles, objets d'art, tableaux et souvenirs de famille. Ce n'est pas un musée mais une propriété familiale ouverte au public qui appréciera d'oublier notre époque pendant une heure pour découvrir l'atmosphère des XVIIIème et XIXème siècles.
Germaine de Stael par François Gérard
Anne-Louise Germaine Necker, baronne de Staël-Holstein
(1766-1817)
Fille du banquier genevois Jacques Necker, (plus tard ministre des finances du roi de France Louis XVI), et de la Vaudoise Suzanne Curchod, elle est élevée dans un milieu d'intellectuels nantis, qui fréquentent notamment le salon de sa mère (Buffon, Marmontel, Grimm, Edward Gibbon, l'abbé Raynal et Jean-François de La Harpe).
Elle épouse en 1786 le baron Erik Magnus de Staël-Holstein (1749-1802), ambassadeur de Suède auprès de la cour de France à Versailles, son aîné de dix-sept ans. Le couple se sépara en 1800.
Devenue baronne de Staël, elle mène une vie sentimentale agitée, et entretient en particulier une relation orageuse avec Benjamin Constant, écrivain et homme politique franco-suisse, rencontré en 1794.
Elle est surtout connue pour avoir popularisé en France les œuvres romantiques des auteurs de langue germanique, jusqu'alors relativement méconnues.
Chassée de France par Napoléon Bonaparte qui la considère comme une redoutable intrigante, elle s'installe en Suisse dans le château familial de Coppet qui sert de lieu principal de rencontres au groupe du même nom, et d'où elle fait paraître Delphine (1802), Corinne ou l'Italie (1807) et De l'Allemagne (1810/1813).
Veuve en 1802, elle se remarie en 1811 avec un jeune officier genevois, Albert de Rocca, et rouvre son salon parisien à la faveur de la Restauration de la maison de Bourbon. Elle meurt en 1817 peu de temps après l'attaque de paralysie qui la terrasse durant un bal que donnait le duc Decazes, laissant inachevées ses Considérations sur les principaux événements de la Révolution française, ouvrage posthume publié en 1818.
Le Vestibule
La visite commence par le vestibule aux vastes proportions. Une statue en pied de Necker semble accueillir les visiteurs: elle est en marbre de Carrare, datée de 1817, par le sculpteur allemand Tieck à la demande de Mme de Staël dont on connaît l'admiration passionnée pour son père. Le ministre est drapé dans une toge à l'antique.
Le grand escalier simple et majestueux est dominé par un grand portrait du roi Louis XVI en costume de sacre, Louis XVI qui nomma le propriétaire des lieux Jacques Necker ministre des Finances.
La Salle à Manger d'Eté :
Au mur est accrochée une des très rares séries complètes des précieuse gravures exécutées en France sous le règne de Louis XV, à la demande de l'empereur Kien Long, retraçant la victoire de cet empereur de Chine sur ses ennemis mongols. Les différentes scènes d'abord peintes par des jésuites en poste à Pékin furent ensuite redessinées et gravées par des artistes français célèbres tels que Saint-Aubin, Moreau le Jeune, etc. Il s'agit de la seule série complète qui soit conservée à plat dans ses cadres d'origine.
La table en acajou, d'époque XVIIIème comme les sièges, supporte en son centre un surtout en bronze doré qui fut celui de Mme de Staël.
LA BIBLIOTHEQUE
L'ancienne "grande galerie", dans laquelle Mme de Staël donnait ses célèbres représentations théâtrales, a été transformée en bibliothèque vers 1818 par son fils. Les vitrines ont gardé leur décoration de style "retour d'Egypte"; elles sont surmontées de bustes d'hommes célèbres: Homère, Virgile, Diderot, etc.
Les livres de Necker et de Mme de Staël ont été légués par Auguste de Staël à son beau-frère, le duc de Broglie, et ont quitté Coppet en 1830. Ils constituent maintenant une partie de la belle bibliothèque du château de Broglie, en Normandie. Les volumes que l'on voit aujourd'hui ont appartenu au comte d'Haussonville et à son fils, tous deux prénommés Othenin et tous deux membres de l'Académie française.
Mme de Staël est présente dans cette pièce par un buste du sculpteur Tieck, et un portrait par le peintre genevois Massot, "Corinne devant le temple de Tivoli", d'après le grand portrait peint par Mme Vigée-Lebrun, "Corinne au Cap Misène", que Mme de Staël n'avait pas apprécié. Corinne est l'héroïne d'un des deux romans de Mme de Staël, Corinne et Delphine.
LE GRAND SALON
Les trois tapisseries d'Aubusson qui ornent les murs de leurs pastorales étaient déjà dans le château du temps de Necker.
Le mobilier doré, signé des meilleurs ébénistes français du XVIIIème était celui de Necker à Paris; il est recouvert de soieries lyonnaises. Une superbe commode de Boulle illumine la pièce de ses importants motifs en laiton, "à la Bérain", sur fond d'écaille rouge et d'ébène, et de ses bronzes dorés, tandis qu'une autre commode marquetée est l'oeuvre de Kemp, qui fut l'ébéniste de la reine Marie-Antoinette.
LE SALON DES PORTRAITS
Un très beau portrait de Louise de Broglie, comtesse d'Haussonville (petite-fille de Mme de Staël), réplique de celui par Ingres, surmonte un piano de l'époque, car elle avait été une des élèves de Chopin.
LA CHAMBRE DE MADAME DE STAEL
Le grand et superbe lit, un des plus beaux exemples de l'art des ébénistes français du XVIIIème, blanc et or, orné d'amours, de colombes, de flambeaux, symboles de l'amour, et d'étoiles symboles de la nuit ou de l'étoile polaire puisque son mari était suédois, est ce qui frappe immédiatement. Il est recouvert de soierie de Lyon ivoire, cerise et verte.
Le bureau en acajou est celui de Necker. Il est surmonté d'un buste de Necker jeune, et d'un beau portrait de Mme Récamier, la belle des belles, l'amie fidèle de Mme de Staël, qui brava les interdits de Napoléon pour venir à Coppet, et fut pour cela frappée d'un ordre d'exil à Châlons-sur-Marne.
Madame de Staël à côté du buste de son père, Jacques Necker. Huile sur toile de Firmin Massot
LA CHAMBRE DE MADAME RECAMIER
La tenture de la chambre est constituée de "papier de la Chine" importé par les vaisseaux de la Compagnie des Indes, dont Necker fut un des directeurs. Elle est à cette place depuis le milieu du XVIIIème et a conservé toute sa fraîcheur, montrant des oiseaux volant au milieu d'arbustes fleuris.
Un buste en marbre de Mme Récamier, par Chinard, rappelle l'illustre hôte de cet appartement, ainsi que sa harpe en bois sculpté et doré.
LA CUISINE